29 fevrier- d'autres témoignages...

Témoignage de Nadine Bardieu

29 février 1960, il y a 48 ans, j'ai à peine 8 ans, et je suis heureuse! Demain à Agadir, on fête Mardi-Gras.Maman a préparé nos costumes.Elle a tué une poule pour avoir des plumes!Patou, ma petite soeur a un costume d'indien et moi, je serais déguisée en danseuse espagnole.
Il fait beau et chaud à Agadir en cette période.Comme tous les soirs, on fait un tour à pied avec papa et maman avant de se coucher!On entend nos petits voisins rire et parler fort..Tout le monde se connait dans cette cité de chalets, il y a beaucoup de gens de la BAN.Les enfants jouent avant d'aller dormir.
C'est la nuit,je ne sais pas ce qui se passe,mais je m'entends crier et je pleure!Il y a un bruit assourdissant et mon lit bouge, bouge... J'appelle "maman, papa", ma petite soeur ne s'est pas réveillée, elle n'a rien entendu, comment est ce possible?Moi, j'entends, j'entends ce bruit sourd, ce grondement, j'entende le verre des fenêtres se briser...Sousain deux bras nous soulèvent du lit, c'est papa, il court dans le couloir du chalet!C'est bizarre, ca sent le vin, en passant j'aperçois le frigo renversé dans la cuisine et la bouteille de vin qui se vide..
Pourquoi maman crie t elle autant?Pourquoi ca bouge autant sous nos pieds?Nous sommes dehors, c'est la nuit, et les voisins sont également sortis!Tous crient, pleurent, j'ai PEUR.
Papa veut retourner dans le chalet, pour chercher des papiers, des couvertures etc...
Maman ne veut pas,elle hurle à mon père de ne pas retourner adns la maison!C'est vrai que le chalet a une posture bizarre, il est couché sur un côté, il penche, mais ne s'est pas écroulé comme tant d'autres batiments!
j'ai à peine 8 ans et je tremble comme la terre sous nos pieds, je grelotte, je sais pour la première fois ce qu'est la peur!Il y a de la poussière, des cris, des lueurs dans le ciel, puis plus rien!Le tdt a tué des milliers de personnes, il a tué mon enfance et ma ville.
C'était en 1960, il y a 48 ans, mais je n'ai rien oublié, je ne peux pas oublier, et chaque année je pense à AGADIR, la ville chérie de mon enfance, au rapatriement, à la séparation avec papa(marin sauveteur) que nous avons revu 3 mois après!
Je pense à tous mes petits amis qui sont resté là bas.....
Gadiris je vous aime......

Cliquez sur la carte pour voir un poème ajouté par Régine Terrier...

...sur la photo transmise par Florence Perrot.

Merci Nadine pour cet émouvant témoignage.
Bonne journée à tous
Christine

C'est tellement émouvant...merci Nadine.
Raymond

Bonjour à toutes et tous,
 
Comme l'a dit Raymond, chacun de nous est une perle du collier d'Agadir et apporte ses reflets différents : après la tranche de vie de Christine, le chaos de Michel T., le poignant témoignage de Nadine, la sérénité de Florence avec ses cartes de Founti "quand c'était beau", j'ai envie d'apporter une autre perle en donnant la parole à Agadir par un petit poème japonais que je vous joins au message.
 
Bonne journée à tous, même si elle est, pour beaucoup d'entre vous, lourde de souvenirs.
 
Régine

Merci Régine, c'est très beau.
C'est un jour spécial aujourd'hui et chacun de nous, soit silencieusement, soit avec pudeur, soit en se confiant, soit en témoignant,.. . a envie de dire ce qui les a profondément blessé il y a 48 ans, mais ce n'est pas facile, même écrire cette simple phrase.
Raymond

Merci pour ce témoignage qui comme beaucoup d'autres font partis de notre Agadir disparu. Nous avons tous une histoire sur le sujet mais pas toujours facile de la raconter mais cette journée restera gravée dans nos esprits.
Bien amicalement. Serge.

Nadine, trés émouvant ton récit, j'ai les larmes aux yeux, tant ça me rappelle la méme chose, mais moi j'avais 14 ans et je partais dans la nuit avec la petite fille de mes voisins dans les bras.A tous une pensée émue, On est là, c'est le principal, en tous les cas c'est ce qu'il faut se dire.Je vous aimes tous Gadiris de mon coeur.Bernadette

merci  Michel, pout ton site, un jour comme aujourd'hui ou j'ai une pensée toute particuliére pour mes amis disparus il y a 48 ans, mais toujours bien présents dans ma mémoire, surtout grace  a vous tous et a ces images que vous savez tous si bien mettre en valeur.Mais bien sur la vie continue pour nous et c'est en faisant comme nous faisons que nous leur rendons le meilleur homage.Grace aux belles photos de cigognes de  Paul, a la  Belle petite Charlotte, et a toutes vos histoires droles et vos photos.Cet été en rentrant en métropole, je vais essayer d'en trouver chez maman.Amitiées Bernadette

jjmf

Ah, ma petite Nadine !
 
Qu'as-tu fait ? moi qui me suis évadé, moi qui me suis sauvé le plus loin possible ...
Tu viens, avec tes paroles d'enfant ébranler ma vie d"oublieur" tu m'as tellement ému, tu viens de me faire pleurer, moi le dur, l'incassable !
Je n'étais pas sur place ce 29 fev ... j'étais à l'armée et je ne m'en suis jamais véritablement remis (les apparences sont trompeuses), tout avait disparu et je n'avais plus OÙ aller ... Lorsque quelqu'un perd TOUT, que lui reste t-il ...
En l'an 2000, pour le Mémorial 40 j'y suis allé faire un tour, je n'ai rien vu alors que je regardais "avidement" tout autour de moi.
Si je n'avais filmé je pourrais bien croire avoir rêvé !
Nous habitions à Talbordjt, le Talbordjt que je connaissais était Celui où j'avais tout mes amis, Celui où j'ai couru dans toutes Ses rues et Ses ruelles ... Celui d'où je courrais 4 fois par jour, le trajet Maison-École BOSC (ville nouvelle) en empruntant le chemin passant dans le ravin de l'oued TILDI ... Celui qui n'est plus !!! ... 
Le nouvel AGADIR avec son nouveau Talbordjt ... Ne sont plus miens !
Si on me demande << Montre moi la maison où tu as vécu ? >> impossible ! même la rue ni le quartier puisque ...
 
Si je revenais à Agadir, je ne sais pas où voudrais-je habiter ... peut-être comme quelqu'une a fait ... quelque part dans le Bled !
Merci ma petite Nadine (je te parle et tu as 8 ans) de me faire choir de mon nuage ...
 
Je t'embrasse tendrement ma petite ...
Luc de Finlande

Merci Luc pour ton gentil message adressé à la petite fille du tdt!Pour Agadir, j'ai toujours 8 ans, et mon enfance est restée pour toujours "là bas".Je suis retournée a Agadir en 1996, et j'avais l'impression d'être un ovni, je n'ai rien retrouvé, ni ma rue , ni mon quartier...Par contre,les odeurs de safran, de cumin ,de canelle, d'orange,tout est revenu dès que j'ai mis les pieds sur le sol Marocain! ce jour là, J'ai embrassé le tarmac, car je retrouvai ma "terre", mes racines si profondément ancrées en moi!J'espère revoir Agadir un jour, mais je dois avouer que je ne peux plus dormir à Agadir....amitié s ( Nadine )


Nadine,
Ton témoignage me touche particulièrement au coeur, tu dois en saisir la raison, au delà de l'émotion qu'il  occasionne
Il reflète bien le climat innondant de joie, douceur, bonheur, saveurs qui m'étaient  familiers et dans lesquels tu baignais, juste dans l'instant d'avant, juste dans l'instant de la tombée de la nuit, de la tombée de ce jour.
 Cela  fait du bien, cela me fait du bien.
J'ai eu longtemps l'illusion que mon enfance était aussi lumineuse qu 'Agadir la Belle, mais je sais aussi que dans cette période là, le "déséquilibre" s'était introduit dans notre vie avec notre retour en France, dans les mois à venir.  Mais à songer à ce que tu as  évoqué avec tant de justesse, et que nous avons vécu ....non.  Qui aurait pu imaginer la fin du monde comme il se criait dans les rues, la fin de notre monde, de notre enfance. La fin d'Agadir.
Je te précise à cette occasion que je travaille dans (l'UE) d'un service de pédopsychiatrie.
Il n'est pas de pur hasard
J'étais à l'école Bosc mais j'allais à la kermesse annuelle de l'école Ste CX, et je me souviens d'un spectacle , représentant une classe d'élèves interrogés par une maîtresse-élève :  "Elève Bardieu (par ex)   etc    qui répondait tour à tour en chantant :
  -"Nous ne sommes pas des imbéciles nous avons de l'instruction
    Au lycée papa, au lycée papa au lycée papillon."
 
Chaque élève interrogé tour à tour ( nombreux en  bonnet d'âne)  reprenait ce refrain. 
Probablement l'année 1957 ou 1958. J'avais  8-9 ans  et toi donc 6-7
Plus tard, je trouvais un peu déplacé pour une école religieuse de faire chanter aux enfants  
    " Au lit c'est papa, au lit c'est papa au lit c'est papillon ",
Mes yeux papillonnant de coquinerie !!!!  
A bientôt, et merci à toi pour ce moment d'intensité.
Dominique   

Témoignage de Dominique en date du 29 février 2008
(en page privée)
  

 Dominique, je ne trouve pas les mots pour décrire ton bouleversant témoignage, écrit presque minute pour minute 48 ans plus tard!
tu as été si brave!, ....alors que tant de tragédies ou d'accidents se sont accumulés pour toi et ta maman, dans les minutes, les heures, les jours suivants.... et aussi la terrible séparation d'avec ton père.
Brave, brave comme ton papa, aidant les autres... et ta chère maman qui n'a pas été épargnée par le chagrin!
Ton témoignage exceptionnel par son récit presque incroyable et le coeur que tu y mets , ferait honneur au forum "Agadir 1960", cité par François hier et crée par Peyo, (Pierre Gaucher).... avec ceux, également poignants, de Nadine et de Lahcen...(Flo)


Chère Dominique
Vous m'avez émue, profondement. Merci d'avoir puisé dans vos
douloureux souvenirs. La mise par écrit de cette nuit tragique a du
vous coùter bien des larmes . Mais nous tous pouvions les
partager.C'est cela la beauté de notre association: le partage et la
solidarité.
Je vous serre dans les bras avec amitié
+++++
Catherine lesguillons Perrot


bonjour nadine
je t'encourage à le poster sur agadir 1960
 
à quelle école étais tu?
 
es tu sur cette photo?
 
alp
fG

je me rappele de la kermesse, même que ma mère me tenait en laisse!

alp
fG


Le 29/02/08, Granger Fxxx@ yahoo.ca> a écrit :

Mes parents ( 80 ans) viennent de m'appeler, ce 29 février imprègne leur cœur, je leur  ai dit que je venais de voir ce poignant reportage  sur Agadir 1960, ils n'ont pas internet malheureusement et ne se déplacent plus beaucoup, nos pensées vont toutes dans le même sens ce soir, encore aujourd'hui, je ne peux demander à mon père de nous raconter ce qu'il a vécu en tant que sauveteur des premiers instants, au bout d'un moment, il s'arrête, il est submergé par des images qui l'assaillent encore et qu'il ne peut supporter.
Comme le ton du reportage est juste et traduit bien nos (res)sentiments,      nos âmes se tiennent par la main ce soir!

  Tendresses à tous

 Cathy

bonsoir petit gadiri, j'étais à l'école Ste Croix, et je vois que la plupart d'entre vous étaient à Bosc! Je ne retrouve pas de petits camarades de mon école, dommage, mais j'ai les amis d'Agadir et ca fait du bien!Je suis ton conseil et j'envoie mon message sur Agadir 1960. Bisous et bonne soirée

Coucou, c'est encore Nadine, j'ai essayé de poster mon message sur le site d'Agadir, mais je n'y arrive pas, car ca n'est pas une adresse email! Peux tu le transmettre toi même ou bien me dire comment faire? merci et bisous

Bonsoir Nadine,
 
Je suis une ancienne gadirie mais j'ai eu la chance de ne pas vivre le cauchemar que vous avez vécu. J'ai été très émue par la lecture de votre témoignage. Je correspond régulièrement avec Lahcen Roussafi, voilà son adresse, il se fera un plaisir de publier votre témoignage sur son forum :
 
 
Très amicalement
 
Régine Terrier

Je suis avec vous tous ce 29 février.
En PJ ces quelques réflexions .Bisous
Catherine Lesguillons- Perrot

Mes "Amis d'Agadir",

Merci tout d'abord à Fox, Nadine, Dominique.

Merci  Merci merci

Tous vos témoignages me bouleversent, moi qui ne suis pas particulièrement émue le 29 février, une date comme une autre.

Pourquoi? Parce que  dans la vie de tous les jours, je ne pense jamais à Agadir, avant pendant, après le TDT.

MAIS , j'étais ou je suis dans cette histoire douloureuse de la "Catastrophe" comme l'on disait, d'autres manières:

__Cauchemars.  horribles, quotidiens, un plafond qui tombe sur moi de l'âge de 10 ans à 27 ans. Réveil en sursaut, la nuque trempée. Ils cessèrent la nuit de la naissance de mon premier enfant, pour toujours.

__A la place, plusieurs fois par semaine, je descends  la cote du lycée YBT en me perdant car je ne reconnais pas trop mon chemin. Je suis dans la maison des Aït-melloul(home après le TDT) dépouillée de ses meubles et objets.

__Je suis claustrophobe : cinéma, théâtre, toujours en bout d’allée ou 1° rang. Je hais les grands magasins, le train, les gares, le métro.. J’aime l’avion  car je l’ai connu enfant.

J’ai toujours ds mon sac un éventail et un vaporisateur d’eau.

__J’ai attendu d’avoir 45 ans  pour enlever mon alliance, mon solitaire  pour me coucher. Car au cas où  je serais ds la rue  sans rien pour nourrir mes enfants.

__j’ai  attendu d’avoir 50 ans pour ne plus avoir une robe  de chambre et des vraies chaussures sans lacet, au sol prés du lit

__J’ai toujours les placards, les frigos et le congélo pleins de provisions. Elles me rassurent

__Toujours un bougeoir et du feu dans la chambre

___l’eau : toujours  une grande bouteille ds les autos, même en ville, sur la table de nuit. On peut boire ou soigner une plaie.

MARS 1960 :

JE suis une  survivante

Comment l’ignorer, la radio branchée ds la tente égrène les noms des morts toute la journée.

Je suis une survivante de 10 ans qui prends vite la décision à 16 ans de plus tard aider les autres quelque soit ma vie future. D’où mes engagements associatifs  à 30 ans alors que je suis mère et travaille.

Peu m’importe que mon corps soit trop rond que mon visage se plisse, JE VIS.

J’ai laissé sur le bord de la route bien des amis d’enfance. Sous les gravats, sous le Crabe, sous l’autodestruction, sous la tôle froissée…

Mon cœur s’ouvre encore plus pour vous tous ce soir

Votre amie gadirie qui vous embrasse

Catherine Lesguillons Perrot

Chère catherine,
Comme je te ressemble beaucoup en ce 1er mars, lendemain de "notre catastrophe" !!!J'ai comme toi, des placards remplis de provisions, de l'eau, la pharmacie de secours etc....J'ai appris à mes 4 enfants à savoir se protéger si un tdt survenait en France! Et que dire de mes angoisses lorsqu'il y a un tdt quelque part dans le monde? Tout remonte alors, mes souvenirs, mes peurs.Je pense à tous les amis perdus de mes parents, ainsi qu'à mes petits camarades disparus!Bisous cathy et courage.


Catherine, et vous tous
Des serrements très affectueux après des serrements au coeur douloureux.
C'est très gentil à vous, à toi, car vois tu je suis allée consulter la bible/album /classe et je me souviens bien de toi , de tes bandeaux dans les cheveux, très à la mode à l'époque, j'en avais un jaune mais il me gênait tout de même; j'avais besoin d'avoir mes "écoutilles" bien à l'air pour entendre ce qui se passait autour de moi ! !
Nous avons le même âge, semble t il, j'avais un an d'avance, j'ai passé l'examen d'entrée en 6ème, car il y en avait un..., avec une dispense. Sur la ph de ton Cm2, je reconnais des visages certains devaient redoubler.
A un moment donné j'ai été semble t-il  avec André Humeau que tu as dû rejoindre après.
Etais tu aussi à Ste Anne ? je faisais du tennis et jouais souvent avec une fille Meyer, peut être avec où "contre" toi aussi..
 
Et les orages Catherine, les as tu oubliés dans toutes tes ptes séquelles ? moi c'est terrible.... je me calfeutre ds un coin isolé de tout contact électrique, quitte même mon alliance s'il est trop violent? au cas où  ...
 
Combien de fois ai je dormi dans des voitures lorsqu'il y avait eu une secousse, la plus infime qu'il soit où la plus proche. Et puis le métro....aie aie aie, et s'il vient à s'arrêter, c'est "l'éventail". ....En juin dernier d'ailleurs , à la limite du malaise lors d'un arrêt surprise du métro
Sam, mon petit bonheur a dit à une passagère, "c'est parce qu'elle était à Agadir."..., j'étais fort surprise de l'innattendu de sa réflexion. Il est vrai que nous discutons beaucoup tous les 2 et bien sûr je fais le tri de mon langage dans la transmission, mais là alors...
Nous allons régulièrement à Paris,(j'y ai  fait mes études),  ma fille y habite, avec son compagnon ( j'ai oublié de le mentionner ds ma présentation, quel lapsus impardonnable. .il est pourtant si sympatique.. ) et leur fils de 6 ans. Voilà ce sont les retrouvailles et je commence à entrer dans cette famille qu'a créé ton frère, Pierrot  et puis Raymond et Henri....
Flo à bientôt de t'écrire....tes paroles sont chaleureuses et délicieuses
Amicalement à vous tous. Dominique


nous sommes le 1er mars aussi ici maintenant
le soleil n'est pas encore levé , mais il doit être levé sur Agadir
et nous sommes toujours vivants!
alp
fG

 

un grand merci à Vous, Nadine, Dominique,Bernadett e, Luc et Serge (qui ont tant perdu, ce soir là!),ma soeur Catherine, pour vos témoignages et réflexions venant du coeur, à François ,pour le lien vers ce reportage émouvant.
Je n'ai pas le souvenir d'avoir eu peur le soir du TDT, grâce au formidable sang-froid de notre mère...comment avoir peur devant une mère qui  arrive tout de suite dans notre chambre, sort Pierre encore endormi (ou du moins le croyait-elle) de son petit lit, nous conduit aussitôt , mais sans précipitation hors de la maison (tant pis pour nos pieds nus sur les tessons jonchaient le sol de la cuisine), vers un lieu bien éloigné des immeubles (terrain vague) et attend calmement et en nous rassurant( nous posions des questions au sujet de visions assez terrifiantes) , le retour de notre père parti aux Aït Melloul faire un bridge chez son ami Jacques Gilot?
Quand papa est arrivé, elle s'est autorisé quelques larmes dans ses bras, a remis à l'endroit son kimono hâtivement enfilé sur sa nudité...puis papa , il me semble, a effectué aussitôt un sauvetage, sous les phares de son auto, dans un immeuble voisin que j'ai vu  (ou cru voir?)s'écrouler devant moi, à retardement. ...ensuite papa a décidé de faire la tournée de tous ses amis pour les rapatrier chez Jacques Gilot....et ce fût le début de plusieurs mois de vie communautaire chez lui...
Quand les parents n'ont pas peur, agissent,un enfant de 8 ans n'a pas peur (mais  pour Catherine, plus grande, ce fût sans doute différent),et quand on a la chance de ne déplorer aucune victime dans sa famille, les séquelles ne sont pas  si graves.
pas de véritable chagrin ... c'est égoïste, un enfant de 8 ans... du moment que son petit monde n'est pas détruit...ce n'est que bien plus tard que j'ai pu penser à tous ceux qui avaient eu leur vie bouleversée par de si terribles pertes, par un départ précipité....Nous avons été des veinards, les Perrot, de voir peu à peu la vie reprendre le dessus,  la solidarité se mettre en oeuvre, l'amitié se développer, la ville se reconstruire. ..ce fût le meilleur remède à ce terrible choc.
Des traumatismes,  durables, oui..., mais beaucoup moins que certains d'entre vous.
avec toute mon affection.
Flo

Chère Flo,
Dans ma famille, aucune perte à déplorer ce 29 fev,mais des amis, des camarades disparus, et partir d'Agadir, dans l'urgence,retrouver la France que nous aimions beaucoup, mais qui n'était pas "notre pays"....Les premières années de la vie sont les assises de l' être humain et font de nous les adultes que nous sommes aujourd'hui! Ma vie s'est construite à Agadir et ce fut un déchirement de quitter le Maroc dans de telles conditions!Mais comme tu le dis si bien,savourons la chance d'être encore là pour partager nos souvenirs.bisous

a propos des petites séquelles..
début des années 80, à Pau, secousse fortement ressentie par tous les Palois dans la nuit:
elle n'était pas encore achevée que j'étais sur le seuil de la porte d'entrée, Martin dans les bras...
une nuit passée dans la voiture.
Vers 86, à Aix, m^me scénario, en un peu plus violent (tout le monde dans la rue)...là, j'étais devant la porte, avec Mathieu dans les bras, Martin à la main, alors qu' Etienne, le papa, toujours assis sur son fauteuil devant la télé me disait "tu ne crois pas que c'est une secousse?"Normal, il n'est pas de là-bas..
dès le lendemain, dépôt d'un petit sac contenant du lait , de l'eau minérale, du sucre, une lampe torche....dans un coin de l'appartement, entre deux murs porteurs...ça a duré quelques mois, et comme nous tous sans doute, j'ai toujours repéré, à chaque déménagement, la planque la plus sûre, en cas de récidive.
bisous à vous.
Flo

Bonjour Catherine,

Je veux te faire savoir qur ton texte m'a terriblement ému et que pour la première fois je repense à cette nuit là..
J'avais 9 ans et j'étais au bled (l'Oasis du Souss : km33) la nuit du TDT et je me souviens de la très lourde armoire bretonne dans ma chambre (que je partageais avec ma soeur Cathe et la gouvernante Melle Annick)qui bougeait si fort qu'elle a failli s'écrouler au milieu de la pièce. Je me souviens de mon père ouvrant la porte de nos chambres en se "tenant aux murs" pendant la secousse.

et puis je me souviens du lendemain et des jours suivants qui ont vu des dizaines de réfugiés arriver à notre bled pour chercher de la nourriture, un lit, du réconfort je me souviens de gens hagards, blessés, qui attendaient là, assis ou allongés, de comprendre ce qui leur arrivait!

Pendant 5 jours, avec mon frère et mes soeurs, nous avons dormi dans les voitures, aider notre Maman et les Fatimes à servir et réconforter les réfugiés. Puis notre maman nous a emmené à Marrakech via la route du  Tizintest,  en convoi,  avec d'autres réfugiés. De là nous avons pris un vol pour Paris, puis le train pour les Côtes d'Armor où nous avons repris notre scolarité. Mes parents sont restés à Agadir pendant notre absence afin d'aider et de retrouver les corps ensevelis de beaucoup de leurs amis..
Nous avons retrouvé nos parents et repris le chemin du Bled à la rentrée scolaire d'octobre 1960.

Amitiés et à plus tard.

Françoise GUYOMARD/ VANDERSMISSEN
D'autres témoignages sur Agadir 1960
http://www.agadir1960.com/temoignage_008.html

Présentation des amis gadiris
 
24 juin 2012

Amegadirie et Amigadiris

sont à présent réunis sur

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